9 avril 2025

L’influence de la géologie des collines et des vallées sur le caractère des vins

Géologie et vin : ce lien étroit entre la roche mère et votre verre

Dans l’univers du vin, le sol n’est pas un simple support pour la vigne. Il joue un rôle vital en influençant la croissance de la plante, la qualité des raisins, et in fine, le caractère du vin. Les vignerons auxerrois savent qu’un sol argilo-calcaire sur une colline ne donnera pas le même vin qu’un sol alluvial en fond de vallée. Mais pourquoi ? La réponse réside dans la géologie.

Les coteaux calcaires de notre région, qui remontent à l’ère jurassique, sont particulièrement bien drainés, ce qui oblige les racines à plonger profondément. Ces racines, en quête d’eau et de nutriments, puisent au passage une grande variété de minéraux - un facteur qui influence à la fois les arômes et la texture des vins. En revanche, les sols des vallées, souvent plus riches en argile et en limons, retiennent davantage l’eau. Cette humidité accrue peut donner des vins plus opulents, parfois moins précis dans leur structure aromatique.

Pour illustrer ce propos, prenez les vins produits sur les coteaux autour d’Irancy. Ces terres calcaires et pentues donnent des rouges finement structurés, aux arômes frais et tendus de fruits rouges. À l’inverse, les fonds de vallées plus argileux autour de l’Yonne donnent des rouges plus ronds, avec des tanins moins marqués mais une texture plus généreuse en bouche.

Collines vs vallées : que se passe-t-il dans la vigne ?

Les collines : quand drainage et profondeur apportent élégance et finesse

Les vignobles établis sur des collines, comme celles du vignoble de Saint-Bris-le-Vineux, bénéficient d’un avantage naturel : le drainage. Plutôt que de s’accumuler, l’eau de pluie s’infiltre, laissant un sol relativement sec. Cela force la vigne à développer un système racinaire profond, ce qui améliore sa résilience face aux sécheresses estivales et lui permet d’accéder à des nutriments souvent plus variés et mieux équilibrés. Résultat : des grappes souvent plus petites, mais plus concentrées, avec une acidité subtile et une belle structure.

En revanche, ce drainage rapide peut parfois être un défi. Lors de périodes de sécheresse prolongée, ces sols peuvent manquer de rétention d’eau, mettant la vigne sous stress hydrique. Dans de telles situations, les vignerons doivent faire preuve d’une gestion minutieuse du sol et du couvert végétal.

Les vallées : générosité et rondeur mais des défis particuliers

Les fonds de vallées, avec leurs sols souvent plus lourds et riches en limon ou en argile, sont propices à des vins plus ronds et charnus. Ces sols, capables de retenir l’eau, encouragent une végétation parfois plus vigoureuse. Cela peut être une aubaine pour les cépages qui nécessitent une alimentation en eau stable, comme le chardonnay. Ces sols riches engendrent souvent des vins plus généreux au nez, avec des notes d’agrumes mûrs ou de fruits à noyau, et des textures en bouche légèrement plus crémeuses.

Cependant, cet excès d’eau peut poser des problèmes en cas de conditions particulièrement pluvieuses. Un sol trop humide favorise la prolifération de maladies fongiques comme le mildiou ou la pourriture grise. Dans de telles situations, le choix de la densité de plantation et l’entretien de la vigne deviennent cruciaux.

Le rôle du microclimat amplifié par la géologie

Outre la géologie stricte, l’emplacement sur une colline ou au creux d’une vallée influence aussi le microclimat, qui joue un rôle essentiel dans la maturation des raisins. Les coteaux bénéficient généralement d’une meilleure exposition solaire, notamment ceux orientés au sud ou au sud-est, ce qui permet une maturation régulière et optimale. Le mouvement de l’air y est également plus constant, réduisant les risques de gelées printanières ou de stagnation d’humidité.

À l’inverse, les fonds de vallées sont souvent plus frais, avec une humidité atmosphérique légèrement plus marquée. Cela peut ralentir la maturation des raisins et offrir des vins avec une fraîcheur aromatique notable, mais cela peut aussi être un défi dans des années où les conditions climatiques sont défavorables.

L’exemple emblématique des grands terroirs de l’Auxerrois

Un exemple frappant de l’impact géologique sur le profil des vins se trouve avec les différents types de chardonnays de l’Auxerrois. Sur les coteaux calcaires de la région de Vézelay, les vins blancs sont tendus, précis, avec des notes minérales (pierre à fusil, coquille d’huître) et des arômes d’agrumes éclatants comme le pamplemousse ou le citron. Ils se prêtent souvent admirablement bien à la garde.

En comparaison, les chardonnays produits sur les sols plus argileux en fond de vallée, notamment près de Chablis, présentent un profil tout aussi vibrant mais avec plus de rondeur en bouche, et des arômes qui évoluent davantage vers les fruits mûrs comme la pêche ou la poire.

Quand la géologie se marie au savoir-faire

Il serait injuste de ne parler que du sol sans évoquer le savoir-faire du vigneron. Car c’est bien lui ou elle qui doit comprendre et sublimer les nuances de son terroir. La maîtrise de l’ébourgeonnage, de la gestion de l’enherbement, ou encore du pressurage reste essentielle pour que la partition géologique et climatique puisse s’exprimer pleinement. Dans les collines comme dans les vallées, le vigneron est le chef d’orchestre qui transforme cette magie souterraine en symphonie aromatique.

Un paysage diversifié, une richesse sensorielle unique

L’Auxerrois, avec ses monts ondulants et ses vallées douces, est l’exemple parfait d’une région où la géologie tisse une épopée dans chaque bouteille. Que vous préfériez la droiture d’un pinot noir cultivé sur pente calcaire, ou la générosité d’un chardonnay né sur sol argileux, ce territoire offre une palette incroyable de saveurs. Une diversité intimement liée à ses reliefs et à ses sous-sols.

Alors, la prochaine fois que vous dégusterez une cuvée de notre belle région, prenez un instant pour penser à la terre qui l’a vu naître. Vous goûterez peut-être non seulement le fruit du cep, mais aussi la mémoire de collines baignées de soleil et de vallées bercées par l’ombre des cours d’eau.

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